CO2 mon amour 20 février 2016

(Logo de France Inter)Le projet de vente du site de Grignon a été évoqué sur France Inter dans l’émission de Denis Cheissoux « CO2 mon amour » le samedi 20 février 2016. Frédéric Delaméa, membre du CFSG, est intervenu en direct pour exposer la situation.

Voici avec son accord le texte du billet lu par Denis CHEISSOUX au début de l’émission :

« Vous vous souvenez, l’année dernière, à ce même micro, je vous parlais des serres d’Auteuil. Magnifiques serres tropicales en fonte de fer, réalisées à la fin du XIXème siècle par l’architecte Jean-Camille Formigé, devenues une sorte de paradis terrestre pour les botanistes et les promeneurs de l’ouest parisien. Des serres qui présentent un seul défaut : celui d’avoir pour voisin, un certain Roland-Garros, toujours friand de mètres carrés pour augmenter sa surface commerciale, dans le seul but de ne pas se trouver trop à l’étroit pour jouer à la baballe, durant deux semaines dans l’année.

Aujourd’hui, on migre du nord-ouest de la capitale, au sud-ouest, non loin de Versailles. La baballe est d’une taille supérieure, mais la situation est similaire. Ah oui, là, on n’est plus avec des serres de l’époque proustienne, mais devant un château Louis XIII – celui de Thiverval-Grignon – et les 1 100 ha qui lui sont associés. Le tout étant propriété de l’Etat.

Voici donc une jolie superficie que celle de ce château encore occupé par l’école AgroParisTech, garante de la vocation agronomique du site, une vocation qui remonte tout de même à Charles X. Outre une surface agricole utile de 700 ha, le domaine comprend une carrière renommée, appelée « la Falunière », un arboretum, des laboratoires, une ferme expérimentale. Bref, une richesse patrimoniale hors du commun doublée d’une diversité des sols et des sous-sols et de la présence d’espèces endémiques, qui valent au site son classement en ZNIEFF (Zone naturelle d’intérêt écologique, floristique et faunistique). Pour faire court, du pas vraiment ordinaire.

Mais comme en 2019, l’AgroParisTech est censée déménager sur le plateau de Saclay… ah que voilà une belle opportunité pour un État désargenté qui n’a de cesse de vouloir vendre ses bijoux de famille ! Et qui pourrait bien les acheter ces beaux bijoux, hormis des gens qui ne savent pas quoi faire de leurs millions, hum ?… Eh bien, au hasard, les dirigeants du Qatar-St Germain, notre opium club de foot de la capitale, qui sont prêts à verser la bagatelle de 300 millions d’euros pour aménager à Grignon, le nouveau centre d’entraînement du PSG… et jouer aux châtelains entre deux matches de ligue 1. Car rien de tel qu’une vue plongeante sur un monument historique pour faire mouiller le maillot d’une douzaine de milliardaires en shorts. Il faut bien ça quand on veut présenter un certain standing. Il ne s’agirait tout de même pas de passer pour des pouilleux alors que l’on affronte régulièrement les clubs européens les plus fortunés ! Non mais !…

Sauf que cette perspective rend grognons nombre d’habitants de Grignon, pour lesquels le projet apparaît franchement hors jeu. Il faut avouer que la création sur place de 18 terrains de foot et d’un parking de 1 000 places modifierait grandement l’aspect du site. En gros, le PSG s’accaparerait les surfaces sans qu’il y ait réparation.

De plus en plus de terres agricoles sont rongées par l’urbanisation. C’est l’équivalent d’un département français qui disparaît tous les 6-7 ans. Est-il bien nécessaire que les clubs de foot se mettent de la partie pour amplifier le phénomène ? Par le biais d’une pétition, déjà 14 000 signataires ont répondu non à cette question et demandent que ce bien commun qu’est le Domaine de Grignon ne soit pas cédé à des intérêts privés.

Finalement, à bien y réfléchir, à Auteuil ou à Grignon, le sport de haut niveau agit toujours de la même manière. Dès qu’il y a un monument du patrimoine architectural à dénaturer, il répond présent. Le sport riche à millions s’inspirerait-il des bétonneurs de haute volée, qui eux, ne peuvent pas passer devant une zone humide  sans vouloir y bâtir un aéroport ? Allez savoir… »

L’émission est disponible à la réécoute jusqu’au 15 novembre 2018 :

http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=1237517

Merci France Inter et Denis Cheissoux !